9. COOPÉRATION POLICIÈRE ET JUDICIAIRE

Conjuguer efficacité et souveraineté

1 Maintenir la coopération policière et judiciaire dans le domaine intergouvernemental, notamment pour ce qui concerne l’acquis de Schengen (article 21 du protocole intégrant l’acquis de Schengen, annexé au traité d’Amsterdam) ; maintenir en particulier le Système d’Information Schengen (SIS) dans l’intergouvernemental ; maintenir la compétence des fonctionnaires nationaux ("Comités K4"), même dans les matières qui viendraient à être communautarisées.

2 Renforcer le contrôle démocratique sur la coopération policière et judiciaire, en renforçant les compétences des Parlements nationaux, et en créant un "comité inter-parlementaire" composé de parlementaires des pays membres ; ce comité serait chargé de suivre de près cette coopération au niveau européen, notamment à Europol, et de faire en sorte que les Parlements nationaux soient saisis des dossiers en temps utile, sous la forme la plus transparente.

3 Développer les missions d’échanges d’informations confiées à Europol, en lui accordant les moyens nécessaires ; ne pas lui confier de capacités de décision ou de missions opérationnelles supranationales, mais s’attacher à faire mieux travailler ensemble les différents services nationaux.

4 Perfectionner l’entraide directe entre magistrats, dans le sens préconisé par les juges qui ont lancé "l’Appel de Genève" (1er octobre 1996), notamment pour accélérer la transmission des commissions rogatoires, renforcer l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, garantir la levée du secret bancaire à la suite des demandes d’entraide internationale en matière pénale, là où un tel secret pourrait encore être invoqué ; mettre en place et faire fonctionner (dans un cadre intergouvernemental) le réseau de magistrats "Eurojust".

5 Ne pas tomber dans le panneau des fédéralistes, qui saisissent le prétexte des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis pour ressortir de vieux projets supranationaux, comme le mandat d'arrêt européen, qui ne serait d'aucune utilité en l'espèce, mais qui enlèverait aux Etats le moyen de protéger, dans certains cas, les libertés de leurs citoyens.
 

10. FRONTIÈRES

Conserver la maîtrise de notre territoire

1 A la suite des attentats du 11 septembre aux Etats-Unis, montrer que si "l'espace Schengen" a pu servir de base arrière aux terroristes, c'est parce que les frontières entre pays membres de la zone (les "frontières intérieures") sont pratiquement dépourvues de tout contrôle ; lancer un audit indépendant sur les conséquences concrètes de cet abandon des contrôles aux frontières pour les trafics et l'immigration clandestine.

2 Maintenir des contrôles de personnes aux frontières internes de l’Union aussi longtemps qu’une sécurité convenable n’est pas garantie aux citoyens, et que des systèmes juridiques de remplacement n’ont pas été mis en place de manière fiable ; notamment, s’appuyer sur l’article 61 du traité d’Amsterdam pour refuser toute abolition des contrôles sans mesures d’accompagnement d’efficacité égale.

3 Transposer dans le titre IV du traité sur la Communauté (relatif aux questions de circulation internationale des personnes) une clause de sauvegarde similaire à celle de Schengen, permettant à un Etat membre de rétablir rapidement et discrétionnairement des contrôles à ses frontières, si l’ordre public ou la santé publique l’exigent.

4 Approfondir les coopérations des services de police et des douanes des pays membres, de part et d’autre de chaque frontière intérieure.

5 Préserver le caractère national des services douaniers, car il est essentiel à de nombreuses missions de souveraineté, ainsi qu’à la capacité de notre pays de renforcer les contrôles à ses frontières pour défendre les intérêts vitaux de sa population.

6 Lancer un programme européen destiné à aider les pays membres qui ont une frontière extérieure "sensible" (exemple : l'Italie sur la côte Adriatique, l'Espagne face au détroit de Gibraltar) pour qu'ils puissent consacrer davantage de moyens à sa surveillance, dans l'intérêt commun ; veiller toutefois à ne déposséder le pays concerné, en aucun cas, de la responsabilité de ce contrôle, qui doit demeurer national.
 

11. MIGRATIONS

Ne pas laisser croire à l’accueil sans limites

1 Perfectionner une politique de co-développement, par une solidarité active avec nos partenaires d’outremer (voir fiche 15 - Aide au développement) visant, non pas l’assistance, mais la restauration de l’Etat de ces pays, et la constitution d’un tissu de PME locales ; montrer que les problèmes de développement économique ou d’instabilité politique de pays tiers doivent être résolus sur place, et ne peuvent se traduire par l’afflux de populations nouvelles en Europe.

2 Favoriser aussi le développement par la réinstallation au pays d’origine, avec une aide financière, d’immigrés ayant acquis chez nous des qualifications ;

3 Tenir vis-à-vis des pays tiers un discours sans ambiguïté : l’Europe ne peut accueillir toutes les catégories de réfugiés, y compris les réfugiés économiques; elle respectera scrupuleusement la convention de Genève de 1951, qui concerne l’asile de personnes persécutées par des Etats pour des raisons politiques, mais refusera l’extension de cette définition.

4 Refuser l’adoption d’un "statut" de la "protection temporaire", en fait sans limite, qui aboutirait à créer une nouvelle catégorie de réfugiés ; ne pas accepter non plus les règlements européens en préparation, qui donnent une définition extensive du regroupement familial, et en font un droit.

5 Concilier, aux frontières de l’Union européenne, la fluidité de la circulation et le maintien de contrôles efficaces (voir fiche 10- Frontières).

6 Etendre la convention Eurodac (fichier européen d’empreintes digitales des demandeurs d’asile) aux immigrants illégaux.

7 Participer activement aux politiques européennes de renforcement des contrôles aux frontières extérieures de l’Union, y compris en aidant financièrement d’autres pays membres, ou des pays de l’Est candidats, qui constituent pour nous des protections avancées.

8 Proposer à nos partenaires la mise en place d’une coordination des politiques nationales visant à privilégier, parmi les immigrants, l’apport de qualifications dont nous avons besoin.
 

12. POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET DE SÉCURITÉ COMMUNE (PESC)

La coopération intergouvernementale seule efficace

1 Contribuer activement, avec nos partenaires, à l’élaboration d’un nouvel ordre international

- reflétant le caractère multipolaire d'un monde qui, après avoir rompu le système de Yalta, doit s'émanciper de la tutelle américaine,

- obéissant à un code de conduite fondé sur le respect des démocraties nationales,

- soumettant les organisations internationales au contrôle constant des peuples dont elles sont les instruments.

2 Orienter la PESC vers la souplesse et la géométrie variable, plutôt que vouloir l'inscrire dans un cadre fédéraliste qui la condamnerait à l'impuissance. Le compromis de Luxembourg doit être fermement maintenu. Le financement de la PESC ne doit pas être communautarisé mais assuré de manière transparente par des cotisations des Etats alimentant des opérations déterminées.

3 Renforcer le caractère intergouvernemental de la PESC, qui conditionne son efficacité :

- en accroissant le rôle joué par les institutions représentatives des volontés nationales : le Conseil et les Parlements nationaux. Le Conseil peut seul assurer la cohérence de l’ensemble de la politique étrangère de l’Union dans tous ses aspects : PESC, politique commerciale extérieure, aide au développement. Le Haut Représentant de la PESC doit demeurer l’émanation du Conseil. Les Parlements nationaux ne doivent pas être dépossédés du contrôle de la PESC au profit du Parlement européen ;

- en habilitant le Conseil à conférer un mandat à un ou plusieurs Etats membres dans le cadre d’une action commune ;

- en associant dès maintenant les pays de l’Est qui le désirent à certaines actions communes.

4 Favoriser l’émergence d’un Conseil de Sécurité européen, qui doit remplacer l’inefficace système de la troïka.

5 Défendre et promouvoir plus activement le "cercle de coopération" francophone, qui constitue un atout pour la France, et qui fournit une ouverture et une diversification essentielles par rapport au cercle de coopération européen ; pour promouvoir la francophonie, préserver là aussi une politique étrangère décidée à l'unanimité, afin de garder toujours la liberté de défendre nos affinités comme nos intérêts (voir projet national du MPF, fiche n° 5).
 

13. DÉFENSE

Des alliances, mais pas d'intégration

1 Concevoir une "défense en commun" plutôt qu’une défense commune:

- en laissant à chaque peuple le droit de déterminer souverainement ses intérêts de défense ;

- en respectant donc le fondement national de toute défense qui se veut à la fois efficace et démocratique ;

- en excluant de ce fait la notion "d’armée européenne" intégrée.

2 Réviser le traité d'Amsterdam et arrêter la ratification du traité de Nice pour introduire clairement les mécanismes précis d'une libre coopération des souverainetés nationales en matière de défense ; inscrire cette coopération, soit dans une partie distincte du traité prévoyant explicitement la géométrie variable des actions, soit dans un traité d'alliance séparé.

3 Dans l'un ou l'autre cas, prévoir les règles suivantes :

- alliance défensive entre les membres, mais libre choix de ceux-ci pour leur engagement dans toutes les autres situations,

- décisions et contrôle exclusivement par les démocraties nationales ; notamment, contrôle des Parlements nationaux (sans le Parlement européen), directement ou à travers un groupe inter-parlementaire de contrôle.

4 Parvenir à une rénovation profonde de l’OTAN qui, préservant le lien transatlantique existant, consacrerait aussi la reconnaissance de partenaires égaux, et mettrait fin à la domination absolue actuellement pratiquée.

5 Consentir l’effort et avoir la volonté politique nécessaires pour maintenir en Europe une autonomie dans le domaine de la haute technologie militaire, en créant une véritable Agence européenne des armements, avec application de la "préférence communautaire".

6 Développer une étroite coopération en matière de renseignement, indispensable pour faire face aux dangers actuels ou à venir, en menant un double effort technologique et humain ; créer notamment un pôle de renseignement spatial autonome ; accélérer le programme Hélios II de satellites d'observation ; poursuivre la modernisation des satellites de télécommunications ; relancer le programme Horus de satellites radar.

7 Lancer l’étude d’un bouclier antimissiles pour l’Europe, qui serait pris en charge par une structure intergouvernementale, à laquelle participeraient les Etats volontaires.
 

14. ÉLARGISSEMENT

Une Maison des libertés, pas un étouffoir

1 Modifier la méthode de l’élargissement : aujourd’hui, l’Union européenne demande aux pays candidats d’appliquer la totalité des règles de toutes natures en vigueur dans l’Union ("l’acquis communautaire"), et d’accepter le principe d’abandon de la souveraineté nationale au profit d’un super-Etat européen ; demain au contraire il faut inventer les institutions d’une grande Europe libre, avec trois niveaux :

- la Charte des droits des nations,

- la Conférence permanente,

- les coopérations différenciées.

1.2 La Charte des droits des nations affirmerait les valeurs communes des pays d’Europe – parmi lesquelles le respect des démocraties nationales – et définirait les principes d’une "Europe en réseaux" faisant travailler ensemble des nations souveraines (voir fiche 3).

1.3 La Conférence Permanente de la Grande Europe fournirait le cadre de négociation des sujets d’intérêt commun immédiatement accessibles à tous les pays d’Europe centrale et orientale : sécurité, lutte contre le crime organisé, politique extérieure… Le support juridique de cette Conférence Permanente serait l’adhésion immédiate à la partie intergouvernementale des traités actuels (traités sur l’Union européenne stricto sensu).

1.4 Les coopérations différenciées permettraient aux pays d’Europe centrale et orientale qui le souhaitent de participer pleinement, aux côtés de membres de l’Union européenne, à des actions communes. Par exemple, il est urgent de perfectionner les "pactes de préadhésion" en matière de lutte contre la criminalité organisée ou de maîtrise des flux migratoires, pour en faire des cercles de coopération différenciés d’une Europe à géométrie variable.

2 Revoir de fond en comble la politique des fonds structurels (voir fiche 27) et celle de l’agriculture (voir fiche 24) qui deviendraient ingérables si elles étaient transposées telles quelles dans une Europe élargie.

3 Dans le cadre de la nouvelle politique de régulation de la main d'oeuvre (voir première partie, fiche 11), donner la priorité aux personnes venues des pays d'Europe de l'Est.

4 Inverser la méthode Monnet, et substituer au primat de l’économie, qui divise et exclut, celui de la formation et de la culture qui réunit et rassemble. Dans tous les domaines, il faut multiplier entre les nations les échanges et séjours de formation, les bourses, les cours de langues, l’intégration aux équipes de recherche. Ces échanges doivent contribuer activement à la formation des nouvelles élites dirigeantes appelées à prendre la relève des anciens cadres communistes recyclés.
 

15. AIDE AU DÉVELOPPEMENT

Une solidarité active avec nos partenaires d’outremer

1 Réaffirmer l’attachement de l’Union européenne et de la France à leurs engagements, et à leur solidarité envers leurs partenaires d’outremer traditionnels: rappeler en particulier, que les engagements souscrits par la France et l’UE dans le cadre du GATT ne sont en aucun cas supérieurs à nos obligations envers les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, acceptées dans le cadre des conventions de Lomé ; en obtenir confirmation lors des prochaines négociations multilatérales.

2 Continuer en conséquence à donner dans l’Union un accès privilégié aux produits de nos partenaires d’outremer (comme par exemple la banane), tout en veillant à ce que cet accès privilégié ne soit pas détourné au profit d’autres pays.

3 S’opposer à toute tentative de communautarisation de la politique de coopération; maintenir le caractère intergouvernemental dominant du fonctionnement actuel de la convention de Lomé : seule une coordination volontaire des politiques de coopération permet en effet de bénéficier de l’expérience et du dynamisme des acteurs nationaux.

4 Recentrer l’action de la Commission européenne sur l’appui aux programmes nationaux de coopération, dans le cadre d’une coordination européenne articulant ces différentes politiques. L’action européenne apporterait alors des moyens supplémentaires aux acteurs locaux et nationaux, qui disposent d’une expertise, d’un contact avec le terrain, de réseaux, qu’aucune administration supranationale ne pourra jamais remplacer.

5 Afin d’inciter les gouvernements de nos partenaires à étendre chez eux l’application des normes internationales, notamment dans les domaines sociaux et environnementaux, introduire ces critères dans la politique européenne de coopération.
 

16. MONDIALISATION

Introduire les nouvelles règles d’un commerce équitable

1 Placer les futures négociations de l’OMC non pas sous le signe de la libéralisation pure et simple, mais sous le signe du "commerce équitable", ou de la "libéralisation équilibrée", ce qui implique :

- l’introduction d’une clause sociale dans le commerce international,

- la prise en compte des coûts sociaux et environnementaux,

- la révision des dispositions du GATT qui freinent la mise en oeuvre du principe de précaution dans les domaines sanitaires et alimentaires,

- l’adoption d’un "code de la concurrence mondiale civilisée", incluant des mesures contre le dumping monétaire.

2 Faire reconnaître la légitimité des zones de préférence régionale ; en agriculture notamment, de telles zones doivent permettre de préserver la préférence communautaire, elle-même garante de notre indépendance alimentaire (voir fiche 24- Agriculture).

3 Militer pour la création d'une organisation mondiale particulière pour l'agriculture, distincte de l'OMC ; cette organisation reconnaîtrait et préserverait le droit des peuples à établir leur propre modèle agricole, et à gérer souverainement leur sécurité alimentaire.

4 Ne signer un nouvel accord international sur l’investissement que s’il est explicitement admis que les peuples souverains ont le droit d’imposer des règles du jeu nationales aux entreprises multinationales qui opèrent dans leur pays.

5 Réformer les procédures de la politique commerciale commune, afin de canaliser la frénésie libre-échangiste de la Commission (voir fiche 17- Politique commerciale commune).